Une fois n’est pas coutume, je vais parler d’outils numériques agiles / Lean startup. C’est un vieux loup de mer car systématiquement dans les formations ou coaching, on me questionne sur les outils disponibles et que je commence par répondre par le management visuel :

La première valeur du Manifeste Agile est le privilégier les hommes et les interactions plutôt que les outils et les processus. Le management visuel est clairement un outil qui permet le collaboratif, l’auto organisation, les interactions, quand il est bien mis en oeuvre. Mais je dois admettre, que dans certains contextes, on ne peut se soustraire aux outils numériques.

Disclaimer : ne pensez pas trouver dans cet article une étude exhaustive des outils, je ne vais parler que des outils que j’ai pu utiliser ou croiser lors de mes missions. Je n’ai aucune affiliation avec aucun éditeur logiciel, ceci dit en passant.

Les familles d’outils numériques agiles

Tout d’abord, de quels outils numériques vais-je parler ?

Business case

Les outils pour les business cases : ce sont les outils de business modelling type business model canvas, lean canvas, et les outils de gestion des expérimentations / validations des idées qui vont avec.

Product management

Tout ce qui concerne la gestion du produit et de son périmètre fonctionnel du Product Backlog au plan de release, en passant par des outils de mind map (impact mapping, story mapping, …). Ces outils gèrent les besoins, les epics, les features …

Project management

Ce sont les outils de project management « agile », de la gestion de tâches, user stories mais aussi les bugs tracker…  Ces outils gèrent surtout les tâches et permettent un suivi, au quotidien / Sprint.

Philosophie des outils

J’ai identifié plusieurs philosophies derrière ces outils qui, pour moi, ont guidé leur conception. J’ai simplifié mon modèle en gardant 3 approches :

Outils de gestion de tâches

Ce sont les outils qui permettent de faire de la gestion de tâches, souvent sur la base d’un workflow, que l’on peut souvent customiser. Ce sont plutôt des outils de la famille du Project Management.

Ils ont souvent un peu vieilli, mais ils sont bien implantés dans les organisations, qui ont investi dedans. On trouve des outils de type Jira, TFS… Ces outils suivent les modes méthodologiques à grands renforts de plug in, en permettant d’avoir des vues (simplifiées) type Scrum / Kanban / …

Outils orientés méthodes

D’autres outils que je croise sont orientés méthode. C’est à dire un outil qui implémente plus ou moins bien une méthode. Typiquement toute la famille des outils agiles, qui sont nombreux, mais surtout des outils Scrum, IceScrum en est un bon exemple; c’est également le cas des outils de la famille Business Case.

Ces outils sont souvent une très bonne entrée en matière pour s’aider lorsque l’on débute dans une nouvelle méthode.

Outils génériques

Ce sont des outils de gestion de tâches / todo list, permettant de customiser complètement les workflows, avec une visualisation type management visuel. L’exemple type est Trello, qui marche très bien au passage.

Ils vont plus loin que la todo list lorsqu’ils proposent une implémentation Kanban plus poussée avec classe de service, liens de dépendances entre tickets et tableaux, …  L’outil le plus abouti à mon sens est LeanKit. Les équipes l’adoptent assez facilement en général.

Outils numériques agiles

Bilan des outils

Mon bilan de l’utilisation opérationnel d’outils numériques pour l’agilité est clairement mitigé.

Je passe vite sur les outils de gestion de tâches revampés avec plug ins. Pourquoi vite ? Car ils ont la vie dure, et surtout parce que ce sont devenus des outils corporate la plus part du temps. Difficile de s’en débarrasser ou d’en changer. Il n’y a plus qu’à trouver les bons plugins… Tout le monde râle sur ces outils (sauf certains fans, j’en ai croisé).

Mais honnêtement, je ne trouve pas ces outils très ergonomiques, je les trouve limité par rapport à tous les nouveaux paradigmes de collaboration, d’ergonomie, de visualisation des données, …

Les outils orientés méthode

Je l’ai déjà évoqué, ces outils sont vraiment une première aide pour démarrer avec une nouvelle méthode. C’est dommage de s’en passer. Mais à l’usage, ils deviennent vite un carcan lorsque l’on commence à maîtriser une méthode.

Et puis, les outils nous pousse à faire un choix méthodologique. Car ils implémentent une et une seule méthode. Les méthodes ont des vertus: cadrage pour démarrer, modèle mental simple pour aider à prendre de bonnes décisions. Mais les méthodes sont comme les modèles, il n’y en a pas de bons, certains sont utiles. Personnellement, je fais plutôt des mashups de méthodes (Lean startup, XP, Scrum, Kanban, Lean IT) pour coller aux contextes que je rencontre.

Les outils génériques

Les outils orientés méthodes sont vites contraignants. A l’inverse, les outils trop génériques ne permettent pas de démarrer facilement et surtout ne sont pas une aide à la décision au quotidien.

Prenez un outil kanban, vous allez commencer par un tableau ToDo/WIP/Done. Mais a-t-on besoin d’un outil kanban pour faire cela, Trello suffit largement (en fait n’importe quoi suffit largement pour faire un tableau à 3 colonnes…).

Un outil kanban permet d’aller bien plus loin en terme de modélisation des workflows. Est-ce vraiment pertinent ? Je le pense quand on voit la diversité des contextes. Si vous lisez ce blog, d’abord je vous en remercie, vous avez pu constater des tableaux kanban qu’il serait difficile de modéliser avec un Trello. Et si votre management visuel est trop loin de votre réalité, il ne va pas marcher longtemps.

En gros, les outils orientés méthodes sont intéressants pour commencer mais on est amené à les laisser tomber rapidement; les outils génériques sont intéressants une fois que l’on maîtrise, mais difficile à prendre en main au démarrage, les autres sont des outils vieillissant mais bien ancrés.

De l’idée à la solution

Mais ma grande frustration autour des outils numériques agiles est le manque de continuité de ces outils pour passer de l’idée à la solution en production et après. Ils sont silotisés eux-aussi !

Pour moi cela est à la fois un héritage du passé, de la silotisation des organisations, et des approches purement méthodes d’une grande partie des outils.

Si l’on veut plus de collaboration, plus d’auto organisation et plus de force de proposition, pour moi l’enjeu se trouve là : d’arriver à faire une continuité d’utilisation des outils sur tout le cycle de vie de l’idée à la solution, au travers des différents silos des organisations. Ce sera le sujet d’un prochain article.